Le mercredi 15 mars 2023 à 9h30, Tony Moggio, ancien joueur de rugby amateur, tétraplégique depuis 2010 après un accident de mêlée, va tenter de relever un nouveau challenge : descendre en tandem ski la Vallée Blanche. Une première pour un tétraplégique. Ce défi, Tony s’était préparé pour le relever au printemps 2022, mais avait dû finalement renoncer pour cause d’enneigement insuffisant. Quatre ans après avoir relié à la nage le port de Sainte-Maxime à celui de Saint-Tropez à la seule force de ses bras et en seulement 3h05, c’est à un nouvel énorme défi que va se frotter le Toulousain. Le mercredi 15 mars, donc, Tony Moggio se lancera, en tandem ski, dans la descente de la Vallée Blanche. Le rendez-vous est fixé entre 8 h 30 et 8 h 45 au pied du téléphérique de Chamonix direction l’Aiguille du Midi. D’où Tony s’élancera vers 9 h 30, en tandem avec Hervé Bourchanin, moniteur de ski à l’ESF de Chamonix.
« Dans certaines situations, il n’est pas facile d’être optimiste, de rester motivé, de continuer à se fixer des objectifs que certains trouvent impossibles à atteindre parce que trop éloignés de la réalité à leur avis.
J’aime les gens qui ne se fixent aucune limite, malgré les énormes contraintes rencontrées. Ce qui m’a tout de suite plus dans la demande de Tony, à savoir descendre la Vallée blanche à Chamonix en tandem ski, c’est cette façon d’aborder le challenge, de croire en sa faisabilité, tout en écoutant attentivement les personnes qui seront responsables de la sécurité.
Pas question de faire la descente juste pour le buzz, non. Il y a une réelle démarche, des échanges, des questions et… Un petit grain de folie.
Il n’y a pas de risque zéro, mais le sportif de haut niveau a bien conscience de l’engagement que cela engendre.
C’est ce qui m’a motivé dans la participation à ce énième challenge de Tony, la fierté de faire partie de ce projet »,
Raconte Hervé Bourchanin.
La descente se fera par la Vallée Blanche classique jusqu’à la station de Chamonix, selon l’enneigement. La plus grande originalité de ce parcours, c’est d’offrir un ski hors-piste glaciaire d’un dénivelé de presque 2 800 mètres et d’une longueur unique au monde de 20 kilomètres. « Avec cette descente, explique Tony Moggio, je réalise le rêve de tous les amoureux de la glisse, de la montagne et des sommets. Avec Hervé, et encadré par d’autres moniteurs de l’ESF et des professionnels de la montagne, nous allons traverser le glacier du Géant et celui de la Mer de Glace avec un passage sous les séracs de la Salle à Manger. Ces glaciers sont parmi les plus prestigieux d’Europe. Si, en fonction du temps, nous ne pouvons pas descendre jusqu’à Chamonix, alors il nous faudra faire un détour de quarante minutes pour arriver par l’hôtel du Montenvers.
SIX MOIS D’UN ENTRAINEMENT INTENSIF
Les entraînements ont commencé en septembre 2021. Ils ont été fixés par rapport à trois axes : la piscine pour le cardio et l’hypoxie (en nageant sans respirer pour préparer le corps à l’altitude), avec des séances de deux à trois heures par semaine, le coaching boxe, deux heures par semaine, pour la gestuelle, le travail cardio-vasculaire et la musculation, et le renforcement musculaire, une à deux heures par semaine, pour renforcer spécifiquement les muscles du cou et l’habituer aux contraintes des impacts et des changements de direction. « Pour le renforcement musculaire, enchaîne Tony, je suis allé m’entraîner au Centre de rééducation de Verdaich, près de Toulouse, là-même où j’avais été transféré après mon accident. En effet, le Centre est doté d’une section APA (Activité Physique Adaptée), gérée par des coachs sportifs sensibilisés au handicap. Toutes les installations, y compris les appareillages de musculation, sont adaptés et permettent à la personne handicapée de pouvoir gérer le poids et de progresser. C’est également là que j’ai fait ma récupération de kinésithérapie. J’ai pu travailler la « Kiné Respi » qui est une partie très importante pour moi, surtout lorsque je serai en altitude. En tout, je faisais près de si heures de sport par semaine et beaucoup de massages pour la récupération, une phase très importante de l’entraînement ! » Des entraînements qu’il a évidemment dû remettre au goût du jour depuis la fin de l’été. Entre temps, « l’air de rien », Tony s’est mis à la « chansonnette » avec la sortie, en septembre dernier, d’un CD intitulé « Vivre sans ailes ».»
UN DÉFI PHYSIQUE ET MENTAL
Le nouveau défi alpin de Tony Moggio sera tout aussi physique que son précédent défi de Saint-Tropez, voire plus. En effet, évoluer en altitude quand la capacité physique est divisée par deux est déjà un défi. Rappelons que Tony a perdu la moitié de son souffle avec son accident. « C’est comme si je montais avec un seul poumon alors il faut que j’apprenne à économiser mon oxygène, précise Tony. Il me faut aussi tenir compte du froid, car je ne régule pas du tout la température de mon corps. Je vais donc devoir habituer mon corps au froid.
Il y a aussi la difficulté de devoir me coordonner avec Hervé, mon binôme, suivre les courbes et les mouvements qu’il enchaînera. Ce qui n’est pas évident quand tu es tétraplégique. Le défi est de résister à tous les paramètres que m’imposera la montagne. Je serai continuellement dans l’observation et le ressenti de mon corps. » Côté mental, Tony a fait appel à un préparateur pour effectuer un travail sur ses craintes afin d’éviter ou de surmonter le stress afin de le transformer en positif. « Un défi n’est pas seulement physique, il est aussi mental, complète Tony. On parle souvent du dépassement de soi, du second souffle... Il faut savoir que tout cela est dans la tête et que notre façon de penser ou de réfléchir fait souvent la différence pour finaliser nos objectifs. »
L’objectif de ce défi est de montrer que malgré ce qui peut arriver dans la vie il est important de se laisser une chance. La confiance en soi, la confiance en ses compétences et la confiance en l’autre sont primordiales pour se reconstruire et vivre pleinement une vie qui, finalement, continue à défiler.
« Tous les jours je me trouve de nouveaux défis. Je ne marche plus mais je peux vous assurer que j’avance toujours ! », conclut Tony.